La chemise

Les cols de chemise : comment faire son choix ?

Choix du sujet

Le col, c’est pour moi la « couronne de la chemise ». Son choix est important pour mettre en valeur son visage et sa morphologie…

Pour ce deuxième article, j’ai décidé de vous parler des cols de chemise, et d’aborder la question d’un point de vue plus pragmatique ! La chemise a elle aussi une histoire terriblement intéressante, mais je n’ai vraiment pas envie de vous perdre avec une leçon d’histoire supplémentaire, on fera ça plus tard qu’en dites-vous ?

J’aime écrire parce que l’écriture, c’est une forme d’expression à la fois spontanée et réfléchie, mesurée et sans autre limite que celles des mots existants dans la langue employée. Les grands débateurs ont ce talent d’expression à l’oral, mais l’avantage de l’écriture, c’est de pouvoir revenir sur un mot, sur la ponctuation. À L’oral, ce qui est dit est dit. « Oups ».

Bref. J’ai beaucoup aimé rédiger l’article sur le coton, et il y aura d’autres articles de ce genre qui ont une forme très académique et magistrale (« encyclopédique » même pour reprendre l’adjectif d’un camarade de forum), mais ce qui me plait avant tout, c’est d’aborder un sujet sans forcément avoir besoin de faire une structure en quatorze points et soixante-neuf paragraphes (ces nombres sont totalement arbitraires et n’ont absolument aucun sens caché).

C’est ainsi que j’ai décidé de vous parler aujourd’hui de cols de chemise !
Col de chemise cutaway
Riki Saito, tailleur japonais que j'admire énormément (Source photo Instagram : @riki.saito_0727)

Pourquoi ? Parce que la chemise, c’est un des vêtements au centre de la garde-robe masculine, qu’en fonction de ses caractéristiques, on pourra l’associer à différents niveaux de formalité d’une tenue, et le col, c’est pour moi la « couronne de la chemise ».

Le col de la chemise, c’est d’une part l’élément le plus visible de celle-ci, et d’autre part, c’est, dans une tenue, un élément visuel (ou optique) qui va, de façon inconsciente mettre en valeur les éléments qui l’entourent : le visage, au-dessus ; les épaules, de part et d’autre ; le buste, en dessous ; et pourquoi pas aussi la cravate lorsqu’il y en a une. Dans les faits, chaque élément d’une tenue doit faire écho avec les éléments qui l’entourent, d’où l’importance de l’ensemble. Mais le col, c’est le dernier élément qui rattache la tenue vestimentaire à votre visage.

L’anatomie d’un col de chemise

Quand on parle d’un col de chemise, on parle de la partie de la chemise qui entoure le cou. Le col est en fait constitué de 3 éléments : Le pied (ou la chute) qui est la partie qui épouse le tour du cou, en contact avec notre peau ; la ligne de cassure qui détermine l’endroit ou le col se plie ; et le tombant qui est la partie repliée.

structure du col de chemise
Anatomie d'un col (Source de l'illustration : stiff-collar.com / modifiée)

Dans les différents types de col existant, ce sera surtout le pied et le tombant qui vont varier, mais également l’ouverture du col.

 Sur le schéma ci-dessus, que je me suis permis de modifier en ajoutant le nom des 3 parties constituantes d’un col, on distingue 2 cols. Sur chaque col apparaissent des valeurs, exprimées en centimètres. Celui de gauche reprend des valeurs correspondant aux valeurs « minimales » de taille, celui de droite aux valeurs « maximales ». Je mets ces termes entre guillemet, parce que les notions de minima et maxima s’appliquent dans un registre classique, un registre que je juge à la fois être esthétique et raisonnable, étant totalement en phase avec l’auteur de ces illustrations (Julien Scavini sur son blog stiff-collar).

On trouvera toujours des contre-exemples, mais à mon sens, leur justification sera ou bien dû à la morphologie particulière de son porteur, ou à son excentricité. Ou à une mode éphémère.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’un col classique a une hauteur de pied comprise entre 25 et 30mm et que la taille du tombant à la pointe fait entre 7 et 8,5cm. 

Les différents types de col et leur appellation

Alors là, c’est la pagaille. Des cols identiques ont parfois des noms différents, et des cols différents ont parfois le même nom ! Ce qui fait la différence, avant de chercher un nom à son col, c’est, l’ouverture du col, la longueur du tombant à la pointe, et la forme de la pointe. Bon, une pointe, c’est pointu. Mais il existe des cols aux pointes rondes (les cols club).

Je pense qu’on va chercher le pragmatisme, et l’objectif de l’article est surtout de voir visuellement les différences d’un col à l’autre et leur intégration dans un but de cohérence globale.

nombreux cols de chemises pour faire un choix
Différents types de col fréquemment rencontrés

Je vous propose donc cette infographie que j’ai adaptée pour présenter les différents types de col.

Poser les noms au type de col n’a pas été aussi simple qu’on pourrait le penser, pour les raisons évoquées plus haut, mais voilà ma vision du col de chemise, et ce sont, à mon sens, les appellations les plus proches d’une universalité sémantique. En revanche, ne soyez donc pas étonné de voir ailleurs qu’un col italien s’appellera « english spread collar » par exemple, ou qu’un « col français » sera appelé « col italien » et vis versa.

Ce qu’il faut retenir au final, c’est qu’un col peut être très étroit, et très ouvert. Et plus ou moins long.

col de chemise full spread
Ralph Lauren portant une chemise à col cutaway "full spread" ou "horizontal"

Sur cette photo de Ralph Lauren, le col est dit « cutaway » mais il semble encore plus ouvert avec une optique d’ouverture horizontale. Certains le nomment assez logiquement « col horizontal » ou « cutaway full spread ».

3 cols oubliés

Il existe 3 cols que je n’ai pas mentionnés plus haut et qui ont la particularité d’avoir un tombant inexistant ou très peu : le col mao, le col officier et le col cassé.

col de chemise cassé ou cérémonie
Col cassé (Source photo : lechemiseur.fr)

On va commencer par le petit intru des 3, le col cassé (« wing collar »)  qui est un col dont le tombant ne forme qu’un petit triangle et n’entoure pas le tour du cou.

C’est une sorte de col cheminée en ce sens où la structure du col repose sur son pied. Ce type de col ne se porte qu’avec un nœud papillon, et a priori plutôt en tenue de soirée (smoking, habit). On l’appelle aussi « col de cérémonie ».

faire un choix entre les différents cols cheminée

Concernant le col Mao et le col officier, il s’agit de deux cols très proches, caractérisés par l’absence de tombant. Cette structure avec uniquement un pied de col est appelée « col cheminée ».

La différence entre ces deux cols, outre leur origine, réside dans le boutonnage. Le col officier est un col de chemise qui se boutonne, tandis que le col Mao ne se boutonne pas, c’est un col non-fermé. Un col très proche du col Mao est le col mandarin, dont les extrémités sont arrondies, à la différence du col Mao dont les extrémités sont à angle droit.

Quelle forme de col choisir ?

M’est avis qu’en matière de col, il faut prendre quelque chose qui nous plaise d’emblée. Dans 99% des cas, on aura tendance à aller vers quelque chose qui, instinctivement, nous correspond. C’est à mon sens difficile de dire qu’un col est spécifique à telle ou telle morphologie, car ce n’est pas une science, et il n’existe pas de règle autre la règle esthétique qui dit que l’ensemble doit être harmonieux et cohérent.

D’autant qu’on lit vraiment tout et n’importe quoi sur le sujet. J’ai lu sur des articles de sites commerçants, ou même des blogs « spécialisés » des conseils qui sont totalement l’opposé de ce qui, pour moi, représente l’équilibre. En gros, certains conseillent l’inverse de ce que j’explique après l’illustration.

col de chemise en fonction de la morphologie du visage

Mon avis sur la question, c’est que je partage assez le point de vue d’Alan Flusser selon lequel un col permet d’équilibrer un visage. Je vous le partage. Par exemple, un col à l’ouverture étroite aura tendance à affiner le visage. Un col à l’ouverture très grande donnera l’impression au contraire, d’élargir le visage.

Sur cette base très simple, on pourrait conseiller à une personne ayant un visage très fin voir longiligne de s’orienter vers un col plutôt ouvert, ce qui permettra de moins avois cette impression de verticalité.

De la même manière une personne ayant un visage très large, ou rond, de s’orienter plutôt vers un col plus étroit.

Quand on a un visage si trop fin, ni trop large, on ne se pose pas vraiment la question, on peut à peu près tout essayer, et ça permet d’avoir des allures différentes en fonction de son col.

La taille du col a son importance

En effet, plus le tombant d’un col sera long, et plus il aura tendance à allonger le visage. Un col classique ou étroit avec de longues pointes peut être une astuce pour affiner un visage large et rond.

Sur un col plus ouvert ou un col cutaway, je sais bien qu’il n’existe pas de règle stricte qui mentionne une longueur précise, néanmoins je suis de ceux qui pensent que ce type de col doit être suffisamment long pour se glisser sous le revers de la veste.

La hauteur du pied de col a également son importance. Si on a un long cou, un pied de col plus grand va permettre d’habiller le cou. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’un col doit « normalement » monter à mi-cou. Au niveau de la pomme d’Adam ou juste en dessous.

Le choix du col de chemise est déterminant ici opposition
Proportions de cols (Source photo : inconnue / Verygoodlord.com)

Encore une fois, il s’agit de détails pas toujours discernables ni frappant au premier regard. Mais ce petit montage de 2 photos mises cote à cote nous permet très simplement de faire une comparaison entre deux tailles de cols et le rendu final. L’ouverture du col est sensiblement la même.

A gauche, une photo de mannequin moderne, avec une très jolie chemise, un joli col, mais très petit. Trop court. On ne voit pas le visage de cet homme à la barbe parfaitement travaillée, mais il est difficile de ne pas admettre que les proportions ne sont pas bonnes. Un col court et petit avec un visage plutôt carré et large : cela accentue par contraste la taille du visage et donne l’impression que ce dernier est suspendu au bout d’une tige (le cou).

A droite, une photo tirée du blog d’un Very Good Lord, où l’on apprécie les proportions d’un col ouvert dont les pointes viennent délicieusement se blottir sous le revers de la veste. Ici on a l’exemple même d’une cohérence et d’une harmonie entre les éléments : taille de col de chemise / taille des revers de la veste / largeur de la cravate et du noeud / largeur d’épaule.

Je vous concède le fait que les deux images sont inégales : l’un n’a pas de cravate ni de veste, l’autre est pourvu des deux. Il n’en reste pas moins que leur visage semble de taille et de forme sensiblement proche, que l’ouverture du col est la même, et pourtant le rendu est complètement différent : un col trop petit et une tête qui parait immense au bout d’un cou interminable d’un côté ; un col aux proportions équilibrées qui habille le cou de son porteur de façon harmonieuse de l’autre côté.

Et la dureté du col ?

Rassurez-vous, on ne va pas mesurer la dureté d’un col en Vickers. Ni cette fois, ni jamais.

On dit de la dureté d’un col qu’elle est proportionnelle au niveau de formalité de la tenue. Simplifié : un col mou ou souple est plutôt casual (une chemise en lin pour l’été, ou une chemise casual en denim), et un col rigide très dur sera dédié à une tenue très formelle.

magnifique col de chemise haut, à pointe longue, et boutonné
Chemise Hydra+ dans un tissu en coton Soktas (Source : Lopez Aragon)

Comment le col est-il dur ?

Une chemise étant faite d’un tissu souple : comment le col est-il dur ? Historiquement, les cols étaient entoilés, c’est-à-dire comme sur le plastron d’une veste bien faite, à l’aide d’une toile entre le tissu intérieure et extérieure du col. Cette toile, bien que moins souple que le tissu de la chemise, n’était pas suffisamment rigide pour obtenir un col bien dur.

amidon de riz pour les cols de chemise

Ma grand-mère me parlait souvent des cols de chemise de mon grand-père, qu’elle devait amidonner à cet effet : « Si tu savais, j’en ai repassé des cols de chemises, et je les amidonnais à chaque fois ».

Le principe : vaporiser de l’amidon dilué sur le col et le repasser. Plus il y a d’amidon, plus le col va être rigide. Julien Scavini dans un de ses articles sur stiff-collar parle de cols amidonnés qui pouvaient « casser nets » tant leur rigidité était accrue. Je n’ai personnellement jamais vu ou testé la rigidité d’un col amidonné.

L'usage courant : le thermocollant

éclaté d'un col de chemise avec thermocollant
Illustration de pose du thermocollant (source : machine-a-coudre.ooreka.com)

Aujourd’hui, les cols sont thermocollés. Le pied et le tombant. Attention, il existe plusieurs qualités de thermocollant. Les thermocollants bas de gamme font souvent des petites bulles  ou des petites froissures avec le temps. Le lavage et le repassage à répétition n’y feront rien, au contraire, et malheureusement.

Alors quid de l’entoilage traditionnel ou du thermocollant. Je vais être honnête, n’ayant jamais testé la grande mesure de chemise, j’aurai du mal à vous donner un avis tranché. Mais a priori, si même en grande mesure on utilise maintenant des thermocollants, c’est qu’il doit y avoir du positif là-dedans.

Et moi ?

Je pense qu’il faut choisir un col qui nous plait et qui nous parle, en restant dans la norme ou dans le classique, on ne prend pas beaucoup de risque, mais on ne risque pas de faire d’erreur non plus.

Néanmoins ma démarche est de défendre le style classique. Pour moi, tous les cols cités plus hauts offrent suffisamment de diversité pour les différentes morphologies et styles. Le reste, c’est à mon sens de la mode peu esthétique et passagère. Je pense aux cols à double tombants par exemple, ou autres bizarreries du genre. On tombe là dans un univers qui ne me parle pas et que je trouve inélégant. Donc hors sujet.

Pour en revenir aux cols plus classiques, je suis personnellement assez adepte des cols ouverts qui permettent de mettre en valeur le noeud de cravate. Mais j’aime aussi beaucoup les cols classiques, les tab-collars, les pin-collars dont je n’ai pas parlé (mais je vais réparer mon oubli avec l’image ci-dessous). Je n’ai encore jamais testé les cols clubs, mais j’avoue que ça me titille pas mal…

col de chemise pin-collar

Ici on a un pin-collar de la marque TM Lewin, une chemise qui est dans ma penderie. On est sur un col classique, avec un œillet cousu à mi-chemin entre la ligne de cassure et la pointe.

Le pin-collar, c’est en fait un moyen de maintenir son col. A l’époque, les cols n’étaient pas toujours très rigides comme je l’expliquais plus haut, et cette épingle (« pin ») venait maintenir le col en place. Ce col se porte avec une cravate, et l’épingle a ce double avantage de maintenir le col en place, mais également de pousser le nœud de cravate vers l’avant et ainsi le mettre en valeur. Je trouve cette chemise assez chic, et j’aime bien la porter en soirée.

Le pin-collar n’est pas réservé au col classique. En fait on peut mettre une épingle sur à peu près tous les cols. On le retrouve très souvent sur des cols clubs. Néanmoins, dès lors que l’ouverture du col est trop grande, il parait logique qu’on ne puisse plus épingler les deux tombants opposés.

En conclusion

Il existe une grande variété de cols, et j’avoue que l’on peut vite s’y perdre. Il ne faut pas trop se formaliser sur la terminologie des cols car, comme je le disais, d’un pays à l’autre ou d’un marchand à l’autre, on emploie des noms différents. Le but de cet article est avant tout d’avoir un aperçu de ce que le col de chemise a d’important dans une tenue, notamment dans le respect des proportions et la mise en valeur de son visage.

Mon conseil : évitez les cols riquiqui, trop courts, sauf si vous êtes vraiment menu avec une petite tête. Aimez les chemises avec de beaux cols qui mettront votre visage en valeur ! Parce que cette tendance à tout faire trop court, trop slim, trop cher, c’est finalement un moyen de produire en utilisant moins de tissu. D’ailleurs, il suffit de voir qui propose ces « mini-formats ». Pensez-y 😉

Romain

Auteur du blog "Elégance & Précision", Horloger sartorialiste et calcéophile, je partagerai avec vous tout ce que je trouverai sur les sujets qui nous intéressent : l'élégance masculine.

9 commentaires

    • Romain

      Romain

      Merci pour ce commentaire encourageant ! Ce sera surement un article assez costaud, je vais prendre mon temps pour vous proposer les informations les plus pertinentes sur le sujet !

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    CHATEAU

    Bravo pour ces débuts
    Les articles déjà écrits sont très intéressants et j’ai hâte de lire la suite.
    Il me semble qu’il y a une petite coquille sur les mesures :
    « Ce qu’il faut retenir, c’est qu’un col classique a une hauteur de pied comprise entre 25 et 30cm et que la taille du tombant à la pointe fait entre 7 et 8,5cm« 
    Sauf erreur de ma part, le pied est en mm non ?
    Remarque purement constructive cela dit car le reste est très bien !
    Bonne continuation.

    • Romain

      Romain

      Bonsoir et merci beaucoup pour votre commentaire! En effet, coquille, corrigée immédiatement! Remarque totalement constructive qui aide à la lisibilité de l’article donc grand merci encore 😉

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    Antonin

    Super article !
    Je m’interroge, est-ce que le type de col guide forcément les caractéristiques d’une chemise ?
    Par exemple : une chemise avec un col button-down, devra-t-elle (normalement) avoir une gorge piquée (américaine) ?
    Merci 🙂

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    Jacques

    Bonjour,
    Bravo pour cet excellent article que je découvre. Pour mes chemises, je suis Ryuishiro Shimazaki via son livre exceptionnel « Les chemises ». Julien Scavini est un vrai maître et ses cours magnifiques (gilet, pantalon et veste tailleur).
    De votre côté, je fais comme votre grand-mère, j’amidonne mes cols de chemise (1 litre d’eau et 3 cuillère à soupe de Maïzena) pour un résultat parfait.

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